Depuis l’arrivée de la pandémie de COVID-19, le Yoga Kundalini est devenu une véritable tendance, une pratique populaire mise en avant dans de nombreux groupes et formations en ligne. Cette forme de yoga, largement enseignée selon les principes de Yogi Bhajan, attire par son côté « instagrammable » et son allure spirituelle, promettant éveil et transformation personnelle. Pourtant, derrière cette pratique séduisante se cache un passé sombre, rarement abordé par ceux qui la promeuvent.
La popularité d’un yoga controversé
Le Yoga Kundalini, sous l’égide de Yogi Bhajan, connaît une renaissance fulgurante. Sur Instagram et d’autres réseaux sociaux, des milliers de formations pour devenir professeur de yoga sont proposées en quelques clics. Cependant, cette montée en popularité masque une réalité moins reluisante. Très peu d’articles en France évoquent les accusations contre ce yoga, que certains qualifient de « Yoga de la honte ».
L’image de Yogi Bhajan, malgré son décès, continue de générer des revenus. Toutefois, les révélations qui ont émergé au fil des années mettent en lumière un portrait troublant de cet homme présenté comme un guide spirituel. Bhajan a été accusé de viol, de pédophilie et d’abus émotionnel sur ses disciples. Il aurait également utilisé son influence pour fuir la justice et échapper au FBI. Il n’a jamais assumé les responsabilités des actes criminels dont il était accusé, ni montré de remords.
Des mythes et des mensonges
Une partie de l’héritage de Yogi Bhajan repose sur des récits qu’il a lui-même créés pour légitimer sa pratique. Il a notamment affirmé que Guru Nanak, fondateur du Sikhisme, pratiquait le Yoga Kundalini. Cette affirmation, pourtant répétée par les adeptes, ne trouve aucun fondement dans les enseignements sikhs. Guru Nanak pratiquait en réalité le Gyan Yoga et le Bhakti Yoga, sans lien avec le Kundalini.
En plus de manipuler l’histoire, Bhajan a fondé Sikh Dharma International, une organisation censée représenter le sikhisme en Occident. Cependant, cette structure est considérée comme une secte, détournant les enseignements traditionnels sikhs à des fins personnelles et commerciales. Ce mouvement s’est étendu sous la bannière 3HO (Healthy, Happy, Holy Organization), pyramide de ponzi ou les héritiers de l’empire de Bhajan attirent encore des milliers d’adeptes cherchant guidance et sens dans leur vie.
Un professeur de Kundalini ne vous dira peut-être jamais que Yogi Bhajan est un prédateur violeur pédophile, homophobe il a détruit des familles, des vies.
Un mode de vie et des pratiques dangereuses
Les méthodes enseignées dans le Yoga Kundalini Bhajan comportent des risques pour la santé physique et mentale. La technique de « Fire Breathing », une hyperventilation utilisée dans la pratique, peut entraîner des déséquilibres dangereux dans le corps, provoquant des états d’euphorie ou des pertes de conscience. Cette technique, qui peut engendrer une forme d’addiction, est souvent pratiquée sans encadrement médical.
Par ailleurs, les séminaires et stages offerts dans le cadre du Yoga Kundalini Bhajan sont critiqués pour leur caractère manipulateur. Les participants se retrouvent souvent dans des environnements isolés, privés de communication avec l’extérieur, soumis à des régimes alimentaires stricts et à des rituels intensifs. Ce cadre rigide rappelle les structures sectaires, où l’adhérent est vulnérable aux abus physiques, psychologiques et parfois sexuels.
Abus, emprise et appropriation culturelle
Les professeurs de Yoga Kundalini sous Bhajan ne se contentent pas d’enseigner des postures, ils se positionnent souvent comme des « coachs de vie ». Cette emprise psychologique peut être dangereuse, surtout pour des personnes déjà fragilisées émotionnellement, qui sont attirées par la promesse de transformation spirituelle. Le mouvement encourage même un changement d’identité spirituelle, où les adeptes sont invités à adopter des noms composés avec le suffixe « Kaur » pour les femmes, un titre honorifique qui signifie « princesse ».
En outre, Bhajan a également été critiqué pour son appropriation culturelle. Le turban blanc porté par les adeptes du Yoga Kundalini, souvent décoré de symboles sikhs, est détourné de son usage religieux originel. De plus, les rituels du Kundalini rappellent parfois les prières collectives observées dans les Gurdwaras, lieux de culte sikhs. Cette décontextualisation et la commercialisation de ces symboles et rituels ont provoqué l’indignation de nombreux Sikhs à travers le monde.
Un héritage empoisonné
La vie de Yogi Bhajan est loin d’être celle d’un saint homme. Ses liens politiques douteux, notamment avec l’administration Trump à travers la création d’Akal Security, une société privée de sécurité, montrent également les ambitions matérielles derrière son mouvement spirituel. L’entreprise avait pour mission de gérer l’immigration à la frontière mexicaine, un fait troublant pour une organisation prônant des idéaux de paix et de compassion.
Le mouvement Kundalini Bhajan ne se limite pas aux adultes. Beaucoup d’enfants issus de la communauté 3HO ont été envoyés dans des internats en Inde, où ils ont subi des abus physiques, émotionnels et sexuels. Ces institutions, surpeuplées et mal encadrées, ont traumatisé de nombreux jeunes, aujourd’hui adultes, qui témoignent des conditions de vie horribles qu’ils ont endurées.
Ce voyage dans l’univers du Yoga Kundalini Bhajan dévoile une réalité cachée derrière la façade de spiritualité et de bien-être. Il est essentiel que les personnes intéressées par cette pratique soient informées des risques et des abus qui ont longtemps été dissimulés. La vérité commence à émerger, mais le chemin vers une pleine reconnaissance des torts causés par Yogi Bhajan et son organisation est encore long.
Guru Jagat, l’ascension et la chute d’une figure controversée du Kundalini Yoga
Après avoir exploré l’impact dévastateur de Yogi Bhajan et les abus associés à son empire du Yoga Kundalini, il est impossible d’ignorer l’héritage complexe laissé par ses successeurs. L’un des visages marquants de cette génération post-Bhajan est celui de Guru Jagat, née Katie Griggs, une figure controversée dont l’histoire tragique a été mise en lumière dans le documentaire « Breath of Fire » sur HBO.
De professeure de yoga à leader de secte
Guru Jagat a su transformer sa pratique du Yoga Kundalini en une entreprise florissante, attirant des célébrités telles qu’Alicia Keys et Russell Brand. Mais cette ascension rapide s’est accompagnée d’accusations troublantes, notamment celles de son entourage, qui la voyaient plus comme une gourou manipulatrice qu’une simple professeure de yoga. Même sa propre mère la décrit comme une figure aux tendances sectaires, une dérive qui a fini par ternir l’image de sa pratique.
Le Kundalini, une pratique marginale
À l’origine, le Yoga Kundalini de Yogi Bhajan se présente comme un mélange unique de mouvements physiques, de techniques de respiration et de chants. Bhajan, lui-même accusé d’abus sexuels, avait exploité le mouvement hippie des années 1970 pour établir son influence mondiale. Guru Jagat a suivi ce même modèle, en amplifiant son message via les réseaux sociaux, ce qui lui a permis de bâtir un empire spirituel lucratif.
Le traumatisme à l’origine de sa quête spirituelle
Katie Griggs, devenue Guru Jagat, a trouvé dans le Yoga Kundalini une échappatoire à ses propres traumatismes. Après avoir été violée durant ses études universitaires et avoir traversé des périodes de toxicomanie, elle s’est tournée vers cette pratique pour se reconstruire. Elle a par la suite profité de la vulnérabilité émotionnelle de ses élèves pour assujettir et façonner son ascension.
Un empire bâti sur les réseaux sociaux
Grâce à Instagram, Jagat a su captiver des milliers de jeunes femmes en quête de succès et de sens. Elle vendait une spiritualité qui promettait à ses adeptes d’accéder à un pouvoir personnel et à la réussite, avec des programmes comme son « business school ». Pourtant, ces conseils spirituels avaient un prix exorbitant, certaines formations coûtant des milliers de dollars.
Le début de la chute
Les scandales ont commencé à éclater lorsque les accusations d’abus sexuels contre Yogi Bhajan ont refait surface à l’ère du mouvement #MeToo. Plutôt que de soutenir les victimes, Guru Jagat les a publiquement discréditées, suscitant l’indignation au sein même de sa propre communauté. Certains de ses employés et disciples, choqués par son refus de prendre position en faveur des victimes, ont commencé à dénoncer la culture toxique qu’elle avait instaurée.
Conditions de travail toxiques
Les accusations ne se sont pas limitées à sa réponse aux abus. D’anciens employés de son studio de yoga Ra Ma ont dénoncé des conditions de travail intolérables, avec des salaires en deçà du minimum légal et des environnements émotionnellement abusifs. Guru Jagat, cherchant désespérément à maintenir son empire à flot, a même proposé des programmes de mentorat facturés jusqu’à 20 000 dollars.
Théories du complot et virage dangereux
Avec la pandémie de COVID-19, Guru Jagat a pris un virage dangereux en adoptant des théories du complot anti-masque et en minimisant la gravité de la pandémie. Ce changement de ton a choqué nombre de ses adeptes, certains ont quitté son enseignement en raison de ses positions extrêmes. Sa dérive vers le conspirationnisme, en écho à des courants similaires dans d’autres communautés de yoga et de bien-être, a entaché encore plus sa réputation.
Une mort inattendue
Alors que les scandales continuaient de se multiplier, Guru Jagat est morte subitement en 2021 d’une embolie pulmonaire à l’âge de 41 ans. Sa disparition a mis fin à une potentielle confrontation publique avec ses détracteurs, qui continuaient de dénoncer ses pratiques et ses abus de pouvoir. Cette mort tragique a laissé ses disciples dans un mélange de choc et d’incertitude.
Un empire toujours debout, mais terni
Malgré sa disparition, Ra Ma, son studio de yoga, reste actif. Toutefois, son héritage est à jamais entaché par les accusations d’abus émotionnels, d’avidité financière et de manipulation sectaire. L’empire que Guru Jagat a construit est désormais un symbole d’avertissement pour ceux qui cherchent des figures spirituelles en dehors des structures traditionnelles.
L’histoire de Guru Jagat illustre les dangers de la quête de pouvoir sous couvert de spiritualité, tout comme les abus de Yogi Bhajan avant elle. À travers cette dérive sectaire, elle rappelle les risques liés à l’emprise psychologique et aux manipulations au sein de certaines communautés spirituelles modernes.
Sources :
1 https://philipdeslippe.com/french
2 https://lamag.com/featured/yogi-bhajan
3 https://youtu.be/bkfC-BHsqOE?si=RxbwaFXG5WXk73UT
4 https://time.com/7096209/breath-of-fire-hbo-guru-jagat/
5 https://www.acaseforwomen.com/adv/yogi-bhajan/